Francis Cantournet : Les critériums restent une exception française
Président de l’Association des Critériums Cyclistes Professionnels Français (ACPF), Francis Cantournet fait le point sur la saison 2025, marquée par un calendrier resserré, des plateaux plus difficiles à composer et une concurrence accrue des courses à points. Entre optimisme prudent et vigilance, il évoque les défis, les évolutions et l’avenir de cette tradition populaire unique en France.
LNCPro : Est-ce que tu as eu des échos d’autres organisateurs ?
Francis Cantournet : Oui, c’est plus difficile que les années précédentes. Ce n’est pas une nouveauté, mais cette année c’est encore plus compliqué. Avec le calendrier d’après-Tour de France resserré, il est plus difficile d’avoir des coureurs. Les plateaux seront peut-être un peu moins fournis, mais la qualité restera là.
LNCPro : Qu’est-ce qui complique le plus les choses ?
Francis Cantournet : Depuis trois ans, on additionne les points pour les catégories d’équipes. Toutes recherchent des points pour finaliser leur classement, et ça nous gêne. Les équipes privilégient les courses à points, ce qui limite leur disponibilité pour les critériums.
LNCPro : Et pour Marcolès, comment ça se passe ?
Francis Cantournet : On arrivera à faire un plateau. Cela prend plus de temps que d’habitude, et il manquera quelques coureurs, mais on aura environ vingt professionnels, dont Valentin Madouas
et Ben Healy, plus une dizaine d’amateurs. Au total, une trentaine de coureurs, contre vingt-cinq pros les autres années.
LNCPro : Y a-t-il de nouveaux critériums cette saison ?
Francis Cantournet : Oui, un nouveau en Bretagne : le Critérium de Javené, le 24 août. Particularité : il accueillera hommes et femmes. À ma connaissance, c’est le seul critérium avec une épreuve féminine cette année, à part Choisy-le-Roi qui propose une formule mixte homme-femme en duo.
LNCPro : Tu as vu évoluer les critériums depuis que tu organises ?
Francis Cantournet : Je n’ai pas connu la grande époque des quarante critériums et des coureurs qui enchainaient deux courses par jour. Mais en trente ans, j’ai vu le cyclisme se mondialiser, et il est plus difficile de trouver notre place. Paradoxalement, plus c’est dur, plus on reçoit de demandes d’organisations. Quand on a repris l’association, on avait huit critériums, aujourd’hui quinze. On est à la limite, car il faudrait que l’UCI nous protège en réduisant les courses juste après le Tour pour laisser souffler les coureurs.
LNCPro : Penses-tu que l’UCI puisse vous aider ?
Francis Cantournet :J e ne sais pas, mais comme on est au calendrier UCI, on pourrait espérer un aménagement. Cette année, quinze jours après le Tour, il y a plein de courses, puis quinze jours presque vides. Mieux répartir serait bénéfique.
LNCPro : Comment vois-tu l’avenir des critériums ?
Francis Cantournet : C’est une particularité française, liée à l’histoire et à la convivialité du vélo populaire. Mais je suis un peu inquiet : avec la course aux points et la peur des chutes, les équipes hésitent à envoyer leurs leaders. Cela dit, les jeunes coureurs ont encore envie de venir, pour l’ambiance et la proximité avec le public.
LNCPro : Et sur le plan financier ?
Francis Cantournet : C’est toujours difficile de trouver des partenaires privés. Cette année, ça ne s’est pas trop mal passé, mais si les collectivités réduisent leurs aides, on sera fragilisés. Le privé dépend de la santé des entreprises : certaines peuvent aider, d’autres non. On reste à l’équilibre, mais la marge est faible.
LNCPro : Un mot pour conclure ?
Francis Cantournet : Les critériums doivent rester un moment de fête et de lien entre coureurs et public. C’est un format unique, populaire, qui mérite d’être préservé. Tant qu’on trouvera les moyens humains et financiers, on se battra pour que ça continue.
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Par Fred Vdb - photo : Maurice Cuquel