Le regard et la plume de Marc Fayet

A l'heure où nous foulons par procuration le sol de Mars pour chercher si des traces de vies subsistent, voici qu'en Mars et sur terre, par une autre procuration, nous entamons, sous le signe du dieu de la guerre, une autre campagne destinée à prouver que la vie continue entre Saint-Cyr et Nice. C'est une armée de cyclistes internationaux, sortes de légionnaires prêts à affronter toutes les embûches qui se chargeront de nous en apporter les garanties malgré toutes les barrières de mesures morcelant notre pays en zones plus ou moins libres. On dit que nous sommes en guerre contre un ennemi invisible, on ne le sait que trop et cette armée partie ce dimanche aura pour but de nous le faire oublier. Comment ? Mais tout simplement en faisant abstraction du danger, le tenant à distance, en déplaçant la bulle d'espoir qu'ils apportent grâce à cette 79ème édition et qu'ils honorent pour notre bonheur. Seule condition imposée, cette troupe va devoir se livrer aussi sa guerre interne, car c'est leur mission, gagner encore et toujours pour multiplier les exploits, repoussant au second plan ce qui fait pourtant notre univers quotidien depuis un an. Curieux anniversaire que cette épreuve célèbre cette année, dont l'objectif ultime sera de rallier Nice, première étape de la reconquête d'un pays encore divisé, presque éclaté sous des étoiles contraires, instaurant dans notre pays une sorte de Statu quo. Cette campagne est un trait d'union géographique, anticipant ce moment où nous pourrons enfin circuler bien plus librement que le virus, ce jour où nous l'écraserons sous nos pieds, comme les coureurs l'aplatiront sous leurs roues. C'est ce qu'ils ont commencé à faire ce dimanche avec un courageux éclaireur, le premier infirmier de cette campagne de vaccination accélérée, Fabien Doubey qui a fait Saint-Cyr l'école buissonnière durant plus de 100 kilomètres avant que, sortant du bois au moment du sprint final, ce soit Sam Bennett le chirurgien du sprint qui l'emporta pour une première injection fulgurante devançant le docteur Démare arrivé un poil trop tard.

Nous voici donc soulagés par cette première piqure salutaire qui nous dirige vers de favorables lendemains, il en reste encore 6 pour faire nos paris avant Nice et souhaiter une bataille sans pitié qui nous permettra de désigner quel sera le meilleur antidote à notre lassitude, premier vaccin efficace contre la morosité mais surtout contre le statu quo vide.

De Marc FAYET, comédien, auteur dramatique et metteur en scène français