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Philippe Crépel, traçant son sillon...

  

Dans sa première vie, il fut ce qu’il faut bien appeler « un petit pro », finissant toujours loin des podiums. Puis il devint directeur sportif et directeur de course. Portrait de Philipe Crépel, qui voulait servir…    

    

Un coureur, lui ? Pour peu que l’on pose la question, Philippe Crépel corrige d’une formule qui illustre à elle seule, non point sa carrière, mais sa philosophie : « Coureur, non. Disons plutôt un cycliste rémunéré pendant quatre saisons, de 1968 à 1971… »[1] Manière d’exprimer, évidemment, qu’un « coureur », à ses yeux, c’est un autre genre de bonhomme, avec davantage de dons, de puissance, de souffle, d’ambitions, de caractère. Bref, tout ce qu’il n’a jamais possédé « en grand », mais qu’une aimable nature lui a néanmoins distillé, faisant de lui ce qu’il appellera, dans une deuxième formule, « un simple petit pro »[2]. Cela étant, un pro quand même, ce qui signifie, pour des millions d’amateurs, une aventure et un accomplissement. D’ailleurs, Philippe Crépel n’a-t-il pas terminé deux Paris-Roubaix, à la quarante-quatrième place en 1968, à la quarante et unième en 1971 ? Un exploit à sa mesure, mais un exploit réel, d’autant qu’en 1968, pour la première fois de l’histoire, le peloton empruntait la tranchée de Wallers-Arenberg. « Le dernier classé du Paris-Roubaix au parcours le plus dur de tous les temps est également un héros et son nom, le matin encore inconnu, Philippe Crépel, ne doit plus le rester, même si celui qui le porte est arrivé plus de quarante minutes après le vainqueur », commenterait, dans L’Équipe, le lendemain, un très lyrique Jacques Goddet.[3] On imagine la surprise du néo-pro, et sa joie en lisant l’édito du patron. « Il en était très fier », se remémorerait celui qui était devenu, à son tour, l’organisateur de Paris-Roubaix : Jean-Marie Leblanc.[4] Car s’il est une chose qui compta dans la chronique de l’époque, c’était bien l’amitié franche que ces deux jeunes gens nouèrent instinctivement, dans la tradition des compagnonnages nordistes. « Il suivait des études à Lille, et lorsque j’étais stagiaire à La Voix du Nord, je logeais chez sa mère à qui je payais une petite pension, a raconté l’ainé. De son côté, Philippe dormait chez moi quand nous partions pour une course, ce qui fait que nous sommes devenus inséparables. Il était plus jeune que moi d’une année, mais nous avons signé ensemble à l’U.S. Dunkerque, en 1966. Je me souviens même qu’une fois, nous avons passé la ligne d’arrivée ensemble, bras dessus, bras dessous, pour ne pas être départagés ! C’était un lundi, au mois de septembre, lors du Grand Prix de Lapugnoy, une course internationale très prisée chez nous parce que de grands coureurs comme Barry Hoban, Claude Neuts, Claude Rigaut, défendaient les couleurs de la ville. Bref ! un grand club et une belle course. Crépel et moi, nous faisons quarante ou cinquante kilomètres d’échappée. Nous prenons bien sûr une amende parce qu’il est interdit de ne pas disputer sa chance à l’arrivée ! Finalement, il est désigné comme vainqueur au motif que sa roue a franchi la ligne avant la mienne. »[5] 


Une victoire ? Non, un partage dont les deux hommes conserveraient un souvenir ému, avant de défendre à nouveau le même maillot, celui de Pelforth-Sauvage-Lejeune, en 1968. « Tout cela grâce à Maurice De Muer qui fit beaucoup pour le cyclisme nordiste. Sans lui, je n’aurais pas trouvé l’opportunité de m’essayer au professionnalisme », expliquerait Philippe Crépel[6]. Ce qui était oublier que ce garçon solide, fils d’un ancien international de volley-ball, avait remporté, en 1967, l’une des épreuves les plus réputées du moment : le Grand Prix des Flandres. D’où le contrat proposé par De Muer, puis reconduit trois années de suite malgré des résultats en somme insignifiants — des places, loin des premières lignes, dans le Grand Prix d’Antibes, le Grand Prix de Denain, le Tour des Flandres, le Grand Prix d’Isbergues… Mais pour l’intéressé, l’important n’était-il pas qu’il avait découvert sa voie ? Parce qu’à bien y regarder, il traçait sur la route, en prenant le vent, en tirant des bouts, en remontant les bidons, en abritant les copains, en épaulant ses leaders, le sillon qui serait le sien dans la vie. « J’ai porté les valises des autres. C’est un métier », résumerait-il un jour.[7] Et d’ajouter deux mots qui traduiraient peut-être son unique vanité : « J’ai servi. »[8] 


Servir… Une idée que l’on croyait passée de mode, mais que Philippe Crépel cultivait par choix, après avoir sagement pesé ses forces et ses faiblesses. Aussi servit-il sans le moindre regret ceux dont il admirait le talent, Samyn, Janssen, Bernard Guyot chez Pelfort, Ocaña, Rosiers, Santy, Grosskost chez Bic. Puis, une fois quitté les pelotons, il se mit au service de différentes collectivités, d’abord celle de l’A.S. Berck au destin mythique dans l’histoire du basket-ball national, ensuite celle du Zénith de Lille où il assura le rôle de « coordinateur général ». Mais son bonheur resterait, selon son propre aveu, de « servir la famille du cyclisme, service toujours librement consenti, et par cela même épanouissant. »[9] Il revint donc dans un milieu qu’il n’avait jamais totalement déserté, créant l’équipe La Redoute-Motobécane en 1979. « Une grande équipe avec Alain Bondue, Jean-Luc Vandenbroucke, Mariano Martinez, Robert Alban, Ferdi Van Den Haute, Johan De Muynck. J’ai fait cinq ans », insisterait-il au micro de Denis Bastien[10]. Puis, sur l’invitation de Bernard Hinault, il participa à l’aventure de la formation La Vie Claire, avant de chaperonner le Charly Mottet des deux dernières saisons chez Novémail. Souvenirs multiples, souvent heureux… Pourtant, rien ne le réjouirait davantage, la soixantaine passée, que de diriger la Tropicale Amissa Bongo, l’une des principales courses par étapes du continent africain, ou de relancer, en 2012, la randonnée Lille-Hardelot. « Quatre mille cyclistes et cyclotouristes qui aiment tout simplement le vélo », devait-il préciser avec une évidente émotion. Celle d’avoir rendu au centuple les joies glanées en quatre années de professionnalisme. 

  

© Christophe Penot

Retrouvez chaque mois la suite de cette série de portraits dans La France Cycliste,
le magazine officiel de la Fédération Française de Cyclisme.

 

Philippe Crépel en bref 

 

Né le 12 janvier 1945 à Mons-en-Baroeul.

Professionnel chez Pelforth-Sauvage-Lejeune (1968), Sonolor-Lejeune (1969), Bic (1970 et 1971).

Principaux résultats : 7e du G. P. d’Antibes 1968 ; 4e du Circ. De Waes 1968 ; 61e du Tour des Flandres 1968, 36e en 1969 ; 8e du G. P.de Denain 1968, 9e en 1969 ; 15e du Cir. des Régions Flamandes 1968 ; 44e de Paris-Roubaix 1968, 41e en 1971 ; 8e du G. P.de Cannes 1969 ; 30e du Crit. National 1969, 56e en 1971 ; 35e de Gand-Wevelgem 1969 ; 32e de l’Amstel Gold Race 1969 ; 17e du G. P. d’Isbergues 1970 ; 13e de Paris-Bourges 1971 ; 10e du Cir. de la Vienne 1971 ; 2e du Prix de Sin-le-Noble 1971.



[1] Conversation avec l’auteur du 31.07.14.

[2] Ibid.

[3] L’Équipe, 8 avril 1968.

[4] Jean-Marie Leblanc, gardien du Tour de France, Éd. Cristel, 1999, pp. 36-37

[5] Ibid., p. 97.

[6] Conversation avec l’auteur du 31.07.14.

[7] Ibid.

[8] Ibid.

[9] Ibid.

[10] Le Quotidien (Luxembourg) du 13 juillet 2011.



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